Lors du conseil des Ministres du 7 octobre 2019, le gouvernement a présenté son projet de loi portant loi de finances 2020.Ce projet de loi de finances 2020 a été élaboré sur la base d’un taux de croissance de 2,8 % du PIB en baisse par rapport au taux de crois sance 2019 estimé à 4% du PIB. Ce taux de 2, 8% du PIB montre toute la prudence de la politique budgétaire du pays compte tenu des incertitudes qui pèsent sur la croissance mondiale.
Et, dans ce projet de loi de finances 2020, l’on note aussi la persistance du déficit primaire hors pétrole bien qu’en baisse. Il passerait de -24,8% en 2019 à - 21,6% du PIB en 2020.
Le premier constat qu’on peut faire de ce déficit primaire est que le gouvernement ne fait pas d’efforts pour désendetter le pays.
En effet, l'on mesure l'effort d'un gouvernement à travers son solde primaire et, ce solde se doit d'être positif pour rééquilibrer le solde budgétaire, indépendamment du poids de la dette.
Le solde primaire est donc une variable utilisée pour tester la soutenabilité de la dette publique. C’est l’un des facteurs conditionnant l’évolution à la hausse ou à la baisse du ratio dette / PIB.
Avec un taux de 2,8% du PIB, cela ne va pas améliorer le taux d'endettement du pays.
Le recours à la notion de solde primaire revient à jauger la capacité de l’État à rembourser sa dette. Plus cette capacité se réduit, plus les prélèvements obligatoires (impôts, taxes, etc.) ont de chance d’augmenter.
Le solde primaire est un sismographe budgétaire qui résulte de l’évolution des recettes (impôts et prélèvements) et des dépenses décidées par les pouvoirs publics.
Et, le déficit primaire du Congo va continuer d’alimenter la dette publique du pays. Ceci est d’autant plus vrai si l’on analyse ce solde budgétaire à partir du solde structurel et du solde conjoncturel.
Le FMI s'appuie d'ailleurs sur le solde primaire pour imposer les plans d’ajustement structurel qui consistent à dégager un excédent primaire en réduisant les dépenses et en augmentant les impôts et taxes. Ce n’est pas ce que le gouvernement congolais fait car il augmente les dépenses publiques et les impôts et taxes en même temps.
Cette augmentation des impôts et taxes, est une véritable pression fiscale qui se répercute sur les prix des biens et services dont la hausse est constatée par les congolais.
La situation économique demeurera préoccupante en 2020 car structurellement, l'économie congolaise ne va pas atteindre son niveau potentiel permettant de réduire le taux de chômage et, conjoncturellement, le ralentissement de l’économie aura pour conséquence la baisse des recettes fiscales, creusant ainsi le déficit public si l’on ne change pas de politique budgétaire.
Changer de politique budgétaire, c’est adopter une politique discrétionnaire visant à relancer l’économie et donc de mener des vraies réformes structurelles.
Le projet de loi de finances 2020 tel approuvé au Conseil des ministres du 07/10/2019 entend ne pas changer de politique budgétaire comme l’atteste les prévisions retenues pour les recettes et dépenses budgétaires.
Il appartiendra au Parlement lors des débats d’orientation d’amender ce projet de loi de finances 2020 en mettant l’accent sur la maitrise des dépenses publiques.
Il faudrait pour cela envisager la réduction du nombre des Ministères, du niveau de vie de l’Etat, du Parlement, du Sénat et des autres organismes publics.
Cette réduction permettra d’augmenter significativement les dépenses sociales envers les ménages congolais et de payer la dette intérieure des entreprises du secteur privé afin de relancer l’économie.
Le projet de loi de finances 2020 prévoit un budget de l’Etat établi en :
1- Recettes : 2 175 400 000 000 FCFA
2- Dépenses : 1 679 400 000 000 FCFA
Avec un solde budgétaire de 496 000 000 000 FCFA.
On constate que les recettes budgétaires sont en augmentation de 40% par rapport à l’exécution budgétaire de 2018. Et, en même temps une augmentation de 11% des dépenses par rapport à 2018.
Ce constat aurait permis de s’attaquer réellement à la baisse des dépenses publiques d’autant plus que le pays se trouve en face d’un besoin de financement de 931 milliards de FCFA pour financer sa trésorerie.
En effet, le budget prévisionnel de trésorerie 2020 prévoit en :
1- Ressources de trésorerie : 114 000 000 000 FCFA
2- Dépenses de trésorerie ; 1 045 000 000 000 FCFA
Avec un déficit de 931 000 000 000 FCFA.
Ce déficit de trésorerie sera donc financé par le solde budgétaire, soit 496 000 000 000 FCFA ; le FEC du FMI et les appuis des partenaires bilatéraux et multilatéraux, soit un montant total de 151 000 000 000 FCFA.
Calcul :931 000 000 000 – 496 000 000 000 – 151 000 000 000 = 284 000 000 000 FCFA.
L’Etat congolais devrait donc recourir à nouveau à l’endettement pour financer son gap de financement de 284 000 000 000 FCFA.
Or, ce gap de financement peut être financé par la réduction des dépenses de l’Etat afin d’éviter au pays de contracter de nouveaux emprunts qui viendraient alourdir la charge de la dette et le stock de la dette publique.
Si l’on analyse les dépenses publiques prévues dans ce projet de loi de finances 2020, il y a bien des pistes d’audits qui peuvent permettre de réduire ces dépenses.
Outre les dépenses sur les charges financières (paiement des intérêts de la dette) de 105 milliards de FCFA que l’on ne peut pas réduire, il y a des dépenses suivantes :
1- Salaires des fonctionnaires : 391 milliards de FCFA soit +4% par rapport en 2019
2- Biens et services : 192 milliards de FCFA soit + 2 % par rapport en 2019
3- Transferts : 391 milliards de FCFA soit – 36 % par rapport en 2019
4- Investissements : 346 milliards de FCFA soit + 18 % par rapport en 2019
5- Autres charges : 48 milliards de FCFA
De mon point de vue, en annulant l’augmentation de 4% des salaires des fonctionnaires cela permettra d’économiser 17 milliards de FCFA.
En réduisant les dépenses de transfert de 50 % cela permettra d’économiser 155 milliards 600 millions de FCFA.
Soit une économie totale de 155 617 000 000 FCFA.
Ce qui ramènerait pour l’instant le gap de financement de 284 000 000 000 FCFA à 128 383 000 000 FCFA.
Et, si en analysant encore les dépenses publiques, on pourrait arriver à trouver le montant de ce gap de financement.
Ainsi pour l’année 2020 aucun emprunt complémentaire serait nécessaire. Le pays voterait alors un budget 2020 sans emprunt extérieur pour financer sa trésorerie.
Par Verlin Richard BEKA BEKA